Techos’, de l’ombre à la lumière

Il y a les artistes, et puis il y a ceux qui oeuvrent en coulisses. Découverte

par Nicolas Tavarès

Sans les techniciens, pas certain que le « show must go on ». Rencontre avec Aurélie Tissier et Fred Mardon, seuls en scène le temps d’un focus.

Au Son Continu, à Darc ou dans la plupart des festivals de l’été, vous les croiserez sans même prêter attention à eux. Au quotidien, ils sont bloqueurs, poursuiteurs, pupitreurs ou backliners. Bref, des techniciens qui seront aux manettes pour que l’artiste brille sur scène. L’ovation qu’il réclamera pour eux en fin de set braquera les projecteurs sur ces femmes et hommes de l’ombre que l’on résume par le statut d’intermittent du spectacle. Carré Barré a croisé la route de deux d’entre eux : Aurélie Tissier, native de Pouligny-Saint-Martin et Fred Mardon, de Châteauroux. En juillet, la première accompagnera Grand Corps Malade aux « Nuits du Sud » à Vence, au « Vercors Festival » ou au « Chien à Plumes » à Langres. Le second enchaînera « Son Continu », « Paléo Festival » à Nyon, « Déferlantes » de Liège et « Aio Festivale » à Ajaccio dans le sillage de Dadju. Les deux finiront l’été à Darc, quasi point de départ de leur jeune carrière de « techos’ ».

«Je suis électricien de formation, rappelle Fred (ci-contre). J’ai commencé par faire du bénévolat pour Darc. À 25 ans, je n’avais pas encore d’enfants, pas de maison, je commençais à en avoir marre des chantiers, j’ai décidé de sauter le pas pour m’occuper de l’électricité et de la lumière des spectacles. En fait, je touche à tout, sauf au son. En tournée, je peux être bloqueur (alimentation), pupitreur (comme c’est le cas sur les tournées de Lorie ou Dadju) ou poursuiteur (sur « Âge tendre et tête de bois« ). Depuis quatre ans, je suis chef électricien sur « Le Son Continu ». Pour Darc, je ne fais que la régie plateau.» Aurélie, elle, est backlineuse et en l’occurrence, désormais celle de Darc : «Je fais le lien entre l’ingé son et l’artiste sur scène où j’installe tous les instruments. Il y a sept ans, j’ai participé au «Back#Stage» de Darc (lire ci-dessous). C’est là que j’ai véritablement découvert ce métier et que j’ai eu un véritable coup de coeur pour lui» reconnaît la jeune femme (ci-contre).

La quintessence de leur métier, Aurélie et Fred la trouvent dans les tournées : «Ce n’est pas une finalité dans la carrière de technicien, mais on a le sentiment de faire partie d’une famille que je vois plus que ma propre famille» avoue Aurélie. Fred ne dit rien d’autre : «Je connais des techniciens qui ne font que du reggae ou du métal. Parfois, tu es obligé de prendre ce qui vient. Mais plus tu tournes, plus tu te fais connaître et dans le milieu, ça se sait très vite si tu t’intègres bien dans une équipe. Quand l’équipe de tournée est sympa, tu fais moins gaffe au style de musique.» Fred est ainsi passé de Black M à Lorie puis « Âge Tendre », Jenifer, Dadju ou le Scratchophone Orchestra.

Depuis trois ans, Aurélie est le plus souvent dans les pas de Grand Corps Malade : «À la fin de ma formation à Issoudun, j’ai fait un stage chez Planet Live à Bondy. Il a fallu remplacer un collègue qui devait partir en tournée. J’ai reçu un mail à 4 heures du mat’, se souvient-elle. C’était le régisseur de Grand Corps Malade qui me faisait une demande pour deux ans ! Mais selon les plannings, on peut évidemment passer d’un artiste à l’autre. J’adore vraiment cette ambiance de tournée parce que rapidement, ça devient notre propre projet artistique. Et chaque tournée est à vivre comme la dernière, parce que sans nouvel album de l’artiste, on est jamais certain de tous repartir ensemble.»

Vivre la tournée comme la dernière Jusqu’à se retrouver mis en lumière sur scène lorsque l’artiste boucle son périple et qu’il invite toute son équipe à monter saluer le public. Il n’en sera pas question à Darc où les artistes se succèderont pendant huit jours place Voltaire. «Le plus intéressant à Darc, c’est le spectacle final, tranche de toute manière Fred, parce que depuis quelques années, je fais la liaison entre les profs du stage festival, le metteur en scène et la technique. Un peu comme un chef d’orchestre…» En attendant, entre chaque changement de plateau, les soirs de concerts au festival Darc, surveillez bien la scène. Dans la pénombre, vous apercevrez des silhouettes en plein travail. Au milieu de la fourmilière, câble électrique ou instrument en main, il y aura immanquablement Aurélie ou Fred…

Back#stage vu de l’intérieur


Depuis 2002, à l’initiative de Bertrand Ledoux et Éric Bellet, le Festival Darc abrite «Back#stage» (12 au 23 août), un rendez-vous à destination d’un public de 16 à 25 ans intéressé par les métiers et techniques du spectacle. Aurélie
Tissier (lire ci-dessus) y a débuté en 2013. Beaucoup d’autres ont suivi. La formation est encadrée par Marc Prudhomme (régisseur de Louis Bertignac, I Muvrini, Mory Kante), Louis Crestin (régisseur lumière de Cesaria Evora, Benjamin Biolay, Blankass) et Yves Mas (régisseur son du « Napoléon d’Abel Gance » aux Arènes de Nîmes). L’objectif est de faire découvrir les coulisses de la scène et d’initier à la régie générale, la régie plateau, la sonorisation, l’éclairage, le backline jusqu’à la sécurité et l’accueil du public. Vous pouvez encore vous inscrire.
Contact : 02 54 27 49 16

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