Alice Métais athlète pressée

La sprinteuse blancoise vise le Mondial de juillet et pense aux Jeux Paralympiques

par Nicolas Tavarès

Tous les athlètes français qui aspirent aux prochains Jeux Paralympiques ont une obsession : Paris. Elle est même double et se cristallise sur deux enceintes : Charléty et le Stade de France. Car en juillet prochain, le gratin du para athlétisme va s’offrir une répétition générale au stade de la porte de Gentilly à l’occasion du Mondial. L’étape ultime, au Stade de France, ce sera pour septembre 2024. Autant dire que l’horizon d’Alice Métais s’arrête donc à ces deux stades et une course, le 400m. À 21 ans, la Blancoise licenciée à la Berrichonne entend bien participer aux deux rendez-vous.

«Dans ma tête, actuellement, il n’y a que le Mondial. Mais dans un autre coin, il y a les Jeux, bien sûr.» Se qualifier aux deux événements ne sera pas une mince affaire, elle le sait. Sauf à considérer que c’est un obstacle de plus sur son chemin et que depuis qu’elle est toute petite, Alice a appris à les contourner : «Je me suis rendue compte que j’avais un problème de vue à 6 ans, mais ce n’est qu’à 8 ans qu’on m’a annoncé que je souffrais de l’Amaurose de Leber, une maladie rare qui touche la rétine.» Alice n’a que 1/10e à chaque œil, «et personne ne sait comment ça va évoluer.» Pour les instances handisport elle évolue donc en catégorie T13. Sur la piste, elle s’est essayée au 100m (5e des championnats d’Europe 2021), mais sa morphologie l’a envoyée sur le 400m.

Éblouie par le soleil à Marrakech

Au sortir de l’hiver, elle a laissé son nom au palmarès du championnat de France en salle en 64’’. Pour intégrer le top 10 mondial, porte d’entrée aux championnats du monde à Paris, il lui faudra descendre sous la minute. Alice a donc entamé une course contre-la-montre. «Il y a deux mois, j’aurais dit que j’étais à dix marches de l’objectif. Il faut qu’il n’y en ait plus qu’une seule. J’attendrai de voir Marrakech pour faire un point» détaillait la Blancoise un soir d’entraînement à la Margotière. C’était à la fin février. Mi-mars le meeting marocain a tourné court. Alice a été disqualifiée pour avoir quitté sa ligne, éblouie par le soleil. Le chrono tourne.

Ce mois-ci, direction le Portugal pour un stage avec l’équipe de France puis le meeting de Talence qualificatif pour le Mondial. C’est là que Viviane Dorsile entre en scène. Championne d’Europe du 4×400 m en 1994 avec Francine Lande, Évelyne Élien et Marie-José Pérec (vidéo ici), 8e aux Jeux Olympiques d’Atlanta sur la même distance, Viviane est aujourd’hui entraîneure de la Berrichonne athlétisme. Dans sa volonté d’être entourée d’un staff personnel, Alice a tenu à l’avoir à ses côtés. «Un choix logique puisque je suis licenciée à la Berrichonne. J’ai appelé Viviane et je lui ai présenté mon projet. Elle a connu le très haut niveau et humainement, elle est exceptionnelle.» Profiter des conseils de Dorsile n’est pourtant pas chose aisée car au quotidien Alice, étudiante en BTS communication et événementiel, en alternance chez EDF, vit et s’entraîne à Tours.

Avec Viviane Dorsile

Viviane Dorsile : «Je voudrais qu’on se voit au moins une fois par mois pour travailler sa pose de pied, son placement. Je savais que ce serait compliqué dès le départ, c’est pour ça que j’ai trouvé quelqu’un à Joué-lès-Tours qui va s’entraîner avec elle et me tient au courant.» La technicienne et l’athlète se comprennent. Sans doute parce qu’elles partagent la même exigence.

«Alice est très mentale, elle programme trop les choses. C’est un fort caractère qui doit travailler encore plus que les autres parce qu’elle est sportive de haut niveau. Elle doit gagner plus de 4 secondes pour se qualifier au Mondial. C’est énorme en trois mois, mais c’est un super challenge. Elle peut encore progresser, mais parfois elle est trop pressée et moi, je ne peux pas courir à sa place» lâche une Viviane Dorsile sans concession.

«J’ai mis une équipe autour de moi pour être en confiance» lâche l’athlète en écho. Une entraîneure, un préparateur physique, un coach mental et une kiné l’accompagnent dans sa préparation. Alice n’y trouve que des avantages, notamment en cas de blessure : «Sur 400m, on maltraite son corps et je me suis souvent blessée à l’échauffement. Avec la kiné c’est rapidement pris en charge. Pour le reste, j’ai la chance d’avoir mes parents qui m’aident.»

Charly, le papa, joue aussi les chauffeurs pour conduire la petite dernière d’une fratrie de six à ses séances d’entraînement ou sur les compétitions.Depuis des semaines, le petit monde d’Alice est tourné vers Charléty. Il sera temps, ensuite, de penser aux Jeux Paralympiques. «Entre y penser et y arriver, il y a une grosse marche. Pour Tokyo je n’étais pas prête, je n’étais donc pas déçue de ne pas y être. Si je ne suis pas à Paris…» L’athlète ne termine pas sa phrase. Il lui reste un paquet de tours de piste à effectuer pour avoir le droit de fouler celle du Stade de France. Sur son agenda le jeudi 5 septembre 2024 est marqué d’une croix rouge…

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