Trois jours agitos
Pendant trois jours, Carré Barré s’est mis à l’heure des Jeux Paralympiques. On vous embarque au CNTS, avec Elodie Vachet à l’Arena Paris sud et avec Manon Genest au Stade de France. Long récit en mode para et en trois épisodes à lire à votre rythme…
par Nicolas Tavarès
Épisode 1, vendredi 30 août, Centre National de Tir Sportif, Déols.
Ceux qui ont fréquenté le site fin juillet pour les Jeux Olympiques ont très vite repris leurs marques, accompagnés d’une drôle d’impression. Le site a en effet subi un léger toilettage. Disparus les anneaux olympiques, place aux agitos (je bouge, en latin), virgules en bleu, vert et rouge qui expriment l’esprit, le corps et l’âme en reprenant les trois couleurs les plus utilisées dans les drapeaux du monde. Voilà pour votre culture générale.
Pour les affaires sportives, le CNTS reçoit cette fois 161 tireurs en situation de handicap contre près de 350 valides le mois dernier. Forcément, le parvis du site des épreuves de para tir sportif a perdu son côté fourmilière quand le public des JO naviguait du pas de tir extérieur au Stand Final. Pour les Paralympiques, la fosse olympique et le skeet ne figurent plus au programme. Avantage non négligeable : tout le monde sera au sec en cas de pluie.
En juillet, on se souvient que Châteauroux avait rêvé d’une première médaille tricolore pour lancer son histoire d’amour avec les Jeux Olympiques. Ça n’avait pas fonctionné, la Chine rappelant qu’elle était éperdument jalouse et accessoirement nation phare de la discipline. Lorsqu’il s’agira de revenir sur la douzaine paralympique et son passage en terre indrienne, on retiendra que c’est sur un coup de clim’ aussi énorme qu’incroyable que Châteauroux a paraphé la prolongation de son union avec Paris 2024 et que ce sont les Indiennes (sans r) qui ont fait parler la poudre.
Nul ne s’attendait à un tel épilogue dans la première finale des épreuves de tir, réservée à la catégorie R2 Carabine à 10m femmes position debout SH1. Oui, suivre les Paralympiques, ce n’est pas seulement découvrir des disciplines inconnues comme le goalball ou la boccia, c’est aussi se familiariser avec des catégories de handicap moins lisibles qu’un code secret armant la bombe atomique.
Donc, ces dames agiles carabine en main offraient une finale où la Chine de Yixin Zhong et Cuiping Zhang apparaissait comme un challenger de poids face à l’Inde d’Avani Lekhara, championne paralympique en titre, et Mona Agarwal. Les spécialistes tablaient également sur la Coréenne Yoojeong Lee soutenue par une grosse délégation de supporters.
Le coup de froid de Lee
La Suédoise Anna Benson faisait d’abord illusion, mais Lee confirmait le pronostic de ceux qui savent en prenant la mène au 10e tir. La finale de la carabine à 10m à cela de passionnant, qu’elle se transforme en course par élimination à compter du 12e tour et toutes les deux salves. Zhang et Zhong, unies dans la déconvenue, quittaient les premières le terrain de jeu. Lee et Lekhara, pour leur part, étaient à la lutte jusqu’au 19e des 24 tirs. Le moment choisi par Agarwal pour prendre provisoirement la tête avant qu’elle ne faiblisse dans le money time et se contente du bronze. La Coréenne Lee s’installait alors à la première place et faisait le break avant l’ultime salve qu’elle abordait en position de force.
Précisons que les finalistes disposent de 30 secondes pour tirer leur plomb. Sans doute pour savourer son succès à venir, Yoojeong Lee laissait à l’Indienne la priorité du tir puis faisait tourner le temps jusqu’à 8 secondes pour tirer à son tour. Elle effleurait déjà la médaille d’or sauf que…
Sauf que la dernière seconde fut aussi longue qu’un siècle avant que la cible coréenne apparaisse sur l’écran au-dessus de la zone de tir et là, l’impensable eut lieu : Lee venait de lâcher le tir le plus foireux de toute la finale ; un inconcevable 6.8 après tant de régularité. La musique d’ambiance venait de se taire ; on lisait l’incrédulité sur les visages de la délégation indienne, puis d’un coup, des «oh !» de surprise s’élevèrent dans le Stand finale. Chacun comprenant enfin que Avani Lekhara conservait sa couronne sur un inexplicable concours de circonstance. Ce doit être ça la peur de gagner.
Les Bleus ouvrent leur compteur
En être déjà là de tes premiers instants avec les épreuves de para tir sportif, porte à croire que tout peut arriver même au meilleur des moments. Alors quand on te rappelle que la France n’a plus remporté de médailles depuis les Jeux Paralympiques de Londres 2012, quand on te martèle que Tanguy de la Forest, double champion du monde et recordman planétaire est toujours rentré bredouille de ses cinq participations aux Jeux, et quand tu te souviens qu’au milieu de l’été, l’équipe de France des valides a dû se contenter de la seule médaille d’argent de Camille Jedrzejewski à son tableau de chasse, tu te mets à transpirer à grosses gouttes rien qu’à l’idée de voir les Bleus se prendre un nouveau gadin à l’heure des qualifications du R4 Carabine à 10m position debout mixte SH2.
Très vite, pourtant, de la Forest va s’installer en tête de ce round duquel sortiront les huit finalistes. «Toute la journée, je n’avais qu’une seule envie : rentrer dans mon match de qualification, l’envie d’aller en finale puis encore l’envie d’aller chercher la médaille!» exprimera plus tard le Rennais. Sans pression apparente, en tout cas moins que celle de ses parents et d’une vingtaine de supporters venus le soutenir dans sa quête, Tanguy de la Forest roulait vers le podium.
Les qualifs ressemblaient même à une formalité pour lui qui accrochait au passage le record paralympique avec une carte de 638.2 points. Le camp français était sur son petit nuage et dès lors parfaitement disposé à recevoir les honneurs du big boss de Paris 2024, Tony Estanguet en personne, venu se perdre en Berry pour faire le nombre aux côtés des athlètes bleu blanc rouge, saluer les bénévoles et même à la collectivité castelroussine : «Châteauroux a été vu dans le monde entier et le site du CNTS était plein depuis longtemps pour ces Jeux Paralympiques.»
Encore un Slovène sur deux roues
Bon, on ne va pas se mentir, Estanguet a assuré le service après-vente de Paris 2024, mais vivement la quille pour celui qui porte littéralement ces Jeux Olympiques et Paralympiques. Les traits tirés et le sourire usé par ce qu’on appelle la parenthèse enchantée, Tony Estanguet tenait aussi à saluer les Bleus de vive voix, ce qu’il fera avant la finale de de la Forest. «Beaucoup de Français sont derrière vous» lâchera-t-il, recevant en écho de la part du facétieux Jean-Louis Michaud, carabinier bleu : «Au paratir, on a un petit truc en plus» prophétique et clin d’œil appuyé au film à succès d’Artus.
Ce petit truc en plus a depuis vendredi la couleur de l’argent, le métal qui est tombé autour du cou du Breton Tanguy de la Forest au terme d’une finale de feu où le Coréen Huntae Seo et le Néo-zélandais Michael Jonhson lui firent écho durant toute la finale. Mais c’est un quatrième larron qui s’est hissé sur la plus haute marche du podium : le Slovène Francek Gorazd Tirsek. Le tireur n’est pas le premier venu avec ses médailles d’argent à Londres 2012, Rio 2016 et Tokyo 2020.
Pour l’ensemble de son œuvre et tant d’abnégation à nous jouer les Poulidor de la carabine, on lui accordera le mérite d’être enfin sorti du bois au bon moment, c’est-à-dire au 18e tir quand de la Forest et Seo étaient occupés à leur bras de fer. Tanguy n’a pas vu venir ce Tirsek qui porte bien son nom. On devrait pourtant savoir, nous les Français, que l’été venu, quand surgit un Slovène sur deux roues, ça se termine souvent sur la plus haute marche du podium. Tirsek est donc devenu champion paralympique et Tanguy de la Forest son dauphin heureux.
Estanguet fait passer des messages
«Cette médaille est belle parce qu’elle est en France, à Châteauroux, devant ma famille, devant le public français, dans une ambiance dingue. Ce sont mes sixièmes jeux, ma première médaille. Je ne dirai pas que c’est un aboutissement, mais seulement un début parce que j’ai encore deux compétitions à vivre. J’étais là pour faire une médaille et il n’y a pas de regret parce que c’est de l’argent. C’est une médaille paralympique!»
Goûtez à l’argent une fois, vous en voudrez plus. C’est ainsi que ce dimanche 1er septembre, le Rennais s’est offert le titre à la carabine 10m couché. Continuez à suivre les aventures de Tanguy au CNTS, il lui reste encore une épreuve pour compléter sa collection de breloques… De quoi enflammer encore un peu plus les tribunes. Parce qu’on ne vous en a pas parlé, mais vendredi le Stand Finale a connu ambiance incroyable. Bravo aux supporters du Breton, félicitations à l’équipe de France pour avoir poussé derrière Tanguy comme un mort de faim. Les Bleus ont sans doute trouvé dans l’argent de leur coéquipier confiance et sérénité pour la suite.
En tout cas, sur cette première journée, Châteauroux s’est montré à la hauteur du rendez-vous planétaire. Et Estanguet dans tout ça ? Il se félicitait des «2 millions 100000 places vendues pour ces Jeux Paralympiques. Après la première journée, j’étais déjà très heureux et je me rends compte que c’est déjà bientôt fini. Nous voulions marquer les esprits avec ces Jeux, faire passer des messages importants sur l’inclusion, l’unité. Nous allons avancer en tant que nation.» Mesdames messieurs, le patron de Paris 2024 est prêt pour une carrière politique !
Switcher vers les simples
Épisode 2, samedi 31 août, Arena Paris Sud
Changement de décor et direction la capitale, plus précisément à Paris Expo Porte de Versailles rebaptisé Arena Paris Sud. Donnez-lui tous les noms que vous voudrez, pour tout indrien qui se respecte, la Porte de Versailles est synonyme de Salon international de l’agriculture et puis c’est tout. Mais pour les Jeux, Paris 2024 a donc transformé le lieu en écrin pour la boccia, le goalball ou le para tennis de table et l’on retrouve justement la Déoloise Elodie Vachet dans le costume d’entraîneure de l’équipe de France. Ils sont plusieurs avec elle à encadrer les 19 para pongistes tricolores. Les trois premiers jours de compétitions ont envoyé les doubles au charbon. Elodie œuvrait dans l’ombre de trois paires en fauteuil : Emeric Martin – Maxime Thomas, Alexandra Saint-Pierre – Flora Vautier et le mixte Florian Merrien – Flora Vautier.
Grande émotive devant l’Eternel, Elodie Vachet est passée par toutes les nuances dans cette ouverture en mode majeur. Du bleu triste et délavé par la déception avec les éliminations en quarts de Martin et Thomas puis Saint-Pierre et Vautier, au bleu presque étincelant de la médaille de bronze des deux Flo, Merrien et Vautier stoppés par la Chine en demi-finale ce samedi midi.
Pour la Déoloise il est l’heure d’un premier bilan dans les coursives de l’Arena avant de passer à autre chose, autrement dit les simples. «Le double filles a réalisé un gros match et elles perdent après avoir eu deux balles de match. Les deux Flo, eux, n’étaient absolument pas favoris sur les Coréens et pourtant ils ont créé l’exploit pour se qualifier en demi. On est toujours déçu de s’arrêter en demi, mais on perd 3-0 sur les Chinois n°1 mondiaux.» Autant dire qu’il n’y avait justement rien à dire sur le résultat final.
Nuit agitée pour Elodie Vachet
Samedi, peu après 13h30, Elodie Vachet a fait comme le reste du groupe France : elle a basculé vers les matchs en simples qui vont s’enchaîner. Le staff a fait le choix de garder ses ouailles constamment sous la main. Chaque jour, c’est donc tout le groupe qui quitte le village olympique tôt le matin pour n’y revenir que le soir. «C’est pour cela que nous sommes arrivés au village une semaine avant le début des épreuves. Il fallait s’acclimater d’autant qu’il y avait huit nouveaux. Maintenant, nous avons seulement quelques heures pour switcher et laisser ces deux jours intensifs derrière nous. La nuit dernière (vendredi à samedi) j’ai repensé à ces deux balles de match des filles. C’est difficile de trouver le sommeil dans ces conditions.»
La vague qui pousse les Bleus sur tous les sites de Paris 2024 pourrait toutefois aider Elodie à plonger dans les bras de Morphée. Le public de l’Arena Paris sud ne fait pas exception. C’est comme si le fantôme de Félix Lebrun planait encore au-dessus des tables. «C’est un truc de malade cette ambiance.» Au moment où elle prononce ces mots, les gradins du hall 4 se mettent à vibrer. Au centre de la salle se jouent les deux demi-finales messieurs debout. Un Chine-Brésil qui tourne court et un Pologne-Chine qui bascule en faveur des Polonais portés par toute une salle qui hurle «Polska ! Polska !» On n’est pas loin de friser l’incident diplomatique avec l’empire du Milieu…
«Quand tu as 6000 personnes qui poussent comme ça, c’est incroyable. Les Coréens n’ont pas du tout apprécié hier (vendredi), sourit Elodie Vachet. Lors d’un stage de préparation début août, j’avais prévenu le groupe. J’étais venue pour les JO et je leur ait expliqué ce qui allait se passer lorsqu’ils joueraient. Mais il leur a quand même fallu une période d’adaptation.» Ce dimanche, Elodie Vachet l’a passé en mode supportrice «et partenaire d’entraînement. Les pongistes que je coache n’entre en compétition que lundi.» Florian Merrien, déjà élu plus belle paire de moustaches des Jeux, Maxime Thomas et Alexandra Saint-Pierre vont partir à l’assaut des médailles. La coach déloise en espère quelques-unes. Et tant pis si ça lui coutera quelques larmes. «C’est comme ça, je suis très émotive. Je vis la défaite comme la victoire, à fond et c’est toujours à la fin des matchs que je montre mes émotions.» S’il faut faire livrer une palette de Kleenex à l’attention de l’entraîneure des Bleus, pas de problème.
Wen une ogresse chinoise
Épisode 3, dimanche 31 août, Stade de France.
Le Stade de France, les para athlètes tricolores en ont tous rêvé et on ne peut suivre la quête de podium de la Castelroussine Manon Genest sans avoir une pensée pour la sprinteuse blancoise Alice Métais que la Fédération avait mis en réserve comme athlète remplaçante au cas où une blessure écarterait l’un des 11 tricolores sélectionnés. En ce soir de finale, elle est là, au soutien de Manon.
Si on suit la logique, cette ultime journée paralympique de Carré Barré ne peut avoir qu’une couleur. En argent avec de la Forest vendredi; en bronze avec Elodie Vachet par procuration samedi; il ne reste que l’or pour compléter la vitrine à trophées. Problème de taille pour Manon Genest : Xiayoan Wen se dresse sur la route des finalistes du concours de la longueur. La Chinoise est l’incontestable favorite et a un record personnel à 5m45 et 5m42 comme meilleure perf cette saison. Sur le papier, les 4m76 de la Castelroussine (4m59 meilleure perf cette saison) laissent entrevoir un sérieux déséquilibre. Mais à Paris 2024 tout peut arriver.
En tout cas, ses proches sont là au premier rang face au sautoir. Il y a Marie, la maman et son compagnon, le mari de Manon, des amis venus en bleu blanc rouge, Wilfried Kranz son entraineur et surtout, celle pour qui elle est là ce soir, au Stade de France, celle pour qui l’athlète de la Berrichonne s’est battue pour qu’elle l’accompagne au quotidien, jusqu’à l’Insep ces dernières semaines : sa petite Juliette. Les visages sont tendus, les sourires forcés. C’est Paris 2024, le Stade de France, une finale paralympique quoi ! En plus, juste avant l’entrée des huit sauteuses, la lanceuse de poids tricolore Gloria Agblemagnon a accroché une médaille d’argent autour de son cou. On vous a déjà parlé de la pression ?
Le podium se dessine d’entrée
Quand la Chinoise Wen a attaqué son concours avec un saut à 5m23, tout le Stade de France a compris que la recordwoman du monde avait déjà tué le game. Fort heureusement pour l’incroyable délégation indrienne venue à Saint-Denis, Manon Genest lançait elle aussi parfaitement le sien sur un saut à 4m45. A 4m58 puis 4m59 elle affichait une détermination que la seule ukrainienne Tietrakova semblait pouvoir effriter. Elle talonnait Manon, mais vingt centimètres derrière. En fait, la Castelroussine avait déjà consolidé la troisième place sur la boîte. «Je ne vais pas le cacher j’ai quand même eu peur tout le long de me faire doubler.»
C’est au moment de s’élancer pour son sixième saut qu’elle comprit enfin l’évidence, juste après que Tietrakova a manqué sa dernière chance de revenir. Au premier rang des gradins, ses proches chaviraient déjà de bonheur. Un moment de folie douce s’emparait de ce bout de la tribune H dans l’antre dyonisienne où Marc Fleuret, le président du Département et Gil Avérous, le maire de Châteauroux s’étaient subrepticement glissés avec leurs adjoints aux sports pour mieux suivre le concours. Manon, elle, faisait des bonds, multipliait les aller-retour tout le long de la tribune, son drapeau tricolore sur les épaules. Des larmes, des rires des embrassades à tous ceux qui ont permis cette grande aventure et en premier lieu, évidemment, la petite Juliette vers laquelle la nouvelle médaille de bronze avait filé en sortant du sable.
«C’est toi ma championne» soufflait-elle dans un sanglot. Cette fois, Juliette ne s’était pas endormie dans les tribunes comme il y a un an lors des championnats du monde. Et en ce beau soir d’été, la prunelle des yeux de Manon a surtout eu la confirmation que maman n’avait qu’une parole : «A Tokyo (où elle avait terminé 4e, ndlr), Juliette était dans mon ventre. Je lui avais dit t’inquiète pas, maman ira chercher la médaille à Paris avec toi !» Promesse tenue.
Rendez-vous à Los Angeles
Xiayoan Wen (5m44) a donc décroché l’or, record paralympique en prime, devant l’Américaine Jaleen Roberts (4m77) alors que Manon Genest apportait à la Berrichonne une première médaille paralympique. Wilfried Kranz, lui, ne cessait de répéter: «On l’avait rêvé ce scenario. On a tout fait pour que ça sorte. On est passé par des moments très difficiles avec Manon depuis septembre. On est resté dans notre bulle pendant dix mois et je suis content que ça sorte maintenant parce qu’elle était en difficulté notamment aux championnats du monde en mai où elle termine 4e. il fallait rectifier le tir ce soir, c’est parfait.»
Il aura fallu attendre longtemps pour que la toute nouvelle bronzée paralympique vienne en zone mixte. Comprenez-la, désormais Manon a un statut à assumer. Elle ponctuait de surcroît une belle soirée pour le para athlétisme français avec trois médailles (argent de Thimothée Adolphe en attendant de connaitre le résultat de sa réclamation pour récupérer l’or du 400m et Gloria Agblemagnon au poids).
«Ce concours était magnifique. Un Stade de France qui résonnait autant c’est incroyable à vivre, je ne vivrai pas ça deux fois dans ma vie. Pour aller chercher la performance, j’ai eu un moteur très sain : sa fille, son mari, ce sont des moteurs très sains au quotidien. Là c’est le résultat que vous voyez, une partie de l’iceberg. Il a fallu s’accrocher tout au long de cette olympiade. J’étais enceinte juste après Tokyo, il a fallu retrouver un corps, un poids de forme, un corps musclé tout simplement. Et surtout, ça été très dur pour se faire sa place en tant que jeune maman. J’allaite toujours Juliette, ce midi encore, avant de partir, je l’ai allaitée.»
Ces dix derniers mois, Manon Genest avait fait le choix de ne plus répondre aux sollicitations des médias alors en cette douce soirée du 1er septembre, c’est comme si elle voulait rattraper le temps perdu. Le débit ne se tarit pas. Ce n’est qu’un début car lorsqu’on lui demanda à quoi ressemblerait la suite de sa carrière, a désormais 31 ans, la réponse fusa : «D’abord un petit peu de vacances en famille, on va se ressourcer et je vais reprendre mon travail au régiment, ça fera du bien de retrouver le quotidien de quelqu’un lambda et on reprendra l’entraînement direction Los Angeles 2028 parce que je n’ai pas terminé !»
Toutes les finales des Jeux de Paris 2024 débutaient par les trois coups que l’on frappait, comme au théâtre. Pour Carré Barré et l’auteur de ces longues lignes – on n’a pas tous les jours les Jeux en France et à Châteauroux en particulier alors on peut écrire dans la marge pour une fois -, c’est maintenant l’heure de baisser le rideau. Merci d’avoir eu le courage d’aller jusqu’au bout des ces trois jours agitos. Et rendez-vous dans 100 ans…