De verre et de lumière

À La Châtre, chez Nathalie Gesell, cartonnier et peintre-verrier…

par Nicolas Tavarès

Le Prix départemental coup de coeur des métiers d’art a été décerné à Nathalie Gesell pour son travail de restauration des vitraux. Rencontre dans son atelier Clair de Lumière sur les bords de l’Indre à La Châtre.

Les deux battants du portail métallique ont été transformés en vitrail contemporain. Sertis en différents endroits, des rectangles de verre figurent des visages qui vous scrutent et vous invitent à l’interprétation. La vitrine forme en fait l’arbre généalogique de la propriétaire des lieux. Bienvenue à l’atelier Clair de Lumière, le vieux moulin du Lion d’argent pour lequel Nathalie Gesell a eu un coup de coeur lorsqu’elle a choisi de venir s’installer à La Châtre.

En poussant la petite porte de Clair de Lumière, on arrive d’abord dans une galerie d’art. Tendez l’oreille, en fond sonore presque imperceptible bruisse l’Indre qui s’écoule en contrebas. Vitraux, créations de verres multicolores, sculptures, croquis et cartons. C’est une mise en lumière des travaux réalisés par Nathalie Gesell qui s’expose là ; un voile qui se lève en partie sur un métier séculaire : celui de peintre-verrier. «Je suis cartonnier, peintre-verrier. Au masculin, j’y tiens. Vous ne trouvez pas que c’est laid quand on le féminise ?» Le contexte de son métier passion posé, la peintre-verrier, donc, vous conduit devant un vitrail de Saint-Gabriel, un « avant-après » qui traduit un principe de base auquel s’astreint la restauratrice : ne jamais faire de copier-coller, mais se rapprocher au plus près de la vérité.

La page parisienne tournée

Nathalie Gesell nous entraîne ensuite dans son atelier qu’elle partage avec Stéphane Pévérada (lire par ailleurs) et ouvre la parenthèse sur le parcours d’une vie. Originaire d’Argenton, née dans une famille d’artistes peintres et de photographes, elle s’est d’abord spécialisée dans la retouche photo sur plaque de verre. «J’étais responsable de trois magasins à Paris.» L’évolution du métier vers le tout numérique et surtout l’arrivée de sa fille l’incitent à envisager l’avenir différemment. «Il y a 27 ans, j’ai tourné la page parisienne et je suis passée au vitrail.» En mettant un point d’honneur à choisir un espace de liberté dans son propre atelier plutôt qu’oeuvrer en musée. «Pourquoi La Châtre ? Tout simplement parce qu’elle dispose du label « ville métiers d’art » et qu’il y a des aides à l’installation.» Son atelier ouvert, Nathalie Gesell se lancera alors en religion. «Dans le vitrail, on n’y échappe pas. Il faut un minimum de connaissances en art religieux, en histoire de l’art également.»

Restaurer un vitrail en souffrance, c’est aussi se lancer dans de minutieuses recherches. «La restauration des vitraux d’églises ou de chapelles demande un niveau de recherche aussi exigeant que pour les musées» explique-t-elle. Dans le propos de Nathalie Gesell, on mesure le vrai plaisir qu’elle prend à se lancer sur la piste de la position d’une main disparue, de la couleur initiale d’une enluminure, du teint passé d’un visage. «Pour faire ce métier, il faut un tempérament patient. À la longue, ça devient un défaut» sourit-elle. Mais la récompense est à ce prix. L’atelier Clair de Lumière vient d’être désigné coup de coeur départemental du Prix des Métiers d’Art pour la restauration d’un vitrail de l’église Saint-Sulpice de Buxeuil.

Le kiffe des petites églises

C’est tout sauf un hasard car Nathalie Gesell «kiffe les chapelles et les petites églises ! Cette proximité avec les donneurs d’ordre me plaît, c’est vital.» Elle s’illumine tout autant lorsqu’elle vous parle du verre Tiffany, du nom de l’artiste américain Louis Comfort Tiffany : «Je le travaille sur des verrières pour des particuliers. C’est un verre très structuré, feuilleté avec plusieurs oxydes. Cela donne un verre très riche.»  Sa richesse, c’est aussi de se lancer de nouveaux défis comme la création d’une gamme «de bijoux et d’objets de décoration sous le nom de « Cd’L ». Je souhaite également développer le vitrail ou la vitrerie pour les particuliers.» Une clientèle spécifique, qui impose l’échange, une longue discussion : «Il m’est déjà arrivé de déconseiller un vitrail parce que l’endroit ne s’y prêtait pas.» Ce qui ne l’a pas empêché de finaliser un projet contemporain… dans une cuisine ! Preuve que le vitrail sait aussi sortir des églises.

Clair de Lumière
14, rue Alapetite à La Châtre
Tél.: 06 41 01 79 12
www.clairdelumiere.com
Facebook : Clair de Lumière

Un travail d’équipe

Si le coup de coeur du jury du Prix départemental des Métiers d’art a été attribué à Nathalie Gesell, c’est bien un travail d’équipe qui est réalisé au sein de l’atelier Clair de Lumière. À Nathalie le rôle de cartonnier-peintre-verrier; à Stéphane Pévérada (photo) le rôle ô combien essentiel de serticeur-traceur-coupeur. «Stéphane complète le travail que j’effectue en peinture et cartons. Il matérialise mon idée, découpe les pièces de verre, les sertis entre elles et pose le plomb pour assurer la tenue mécanique du vitrail.» C’est leur passion commune qui les a
réunis il y a maintenant une vingtaine d’années et c’est dans la quiétude du moulin du Lion d’argent qu’ils accueillent régulièrement des stages pour les passionnés.

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