La détention en oratorios

En mai, ils devaient être 70 sur scène en prélude au Festival de la Voix. Les instigateurs de la « Trilogie de la détention » font tout pour que le projet soit malgré tout porté sur scène en juin.

par Nicolas Tavarès

« Trilogie de la détention » est un projet artistique qui rassemble collégiens, lycéens et artistes professionnels. Il devait trouver son épilogue en mai lors du Festival de la Voix de Châteauroux qui a malheureusement été annulé pour cause de Covid-19. Mais le projet perdure.

«C’est plus qu’un spectacle !» Thierry Machuel a le sens de la formule. « Trilogie de la détention », composition de trois oratorios profanes sur le thème de l’enfermement carcéral, est en effet beaucoup plus que cela. C’est un vaste puzzle que le compositeur a présenté à plusieurs dizaines d’artistes novices ou professionnels depuis la rentrée scolaire de septembre. Le 15 mai prochain, toutes les pièces devaient enfin être assemblées sur la scène d’Équinoxe en ouverture du Festival de la Voix. Mais ses organisateurs ont dû annuler le festival pour crise du Coronavirus. Toutefois, ils font actuellement tout ce qui est en leur pouvoir pour que la Trilogie soit malgré tout portée sur scène cette année, peut-être même dès juin prochain. Le compositeur tourangeau verra alors prendre forme une pièce musicale chorale originale qui a suscité autour d’elle un intérêt majeur. Cette reprise est en effet coproduite par la Scène nationale, le Festival de la Voix de Châteauroux et le CEPRAVOI. Elle est subventionnée par la DRAC Centre- Val de Loire. La participation des collégiens au projet a été rendue possible par l’aide du Rectorat d’Académie et le soutien du Conservatoire de Châteauroux.

La participation des élèves du Lycée Jean-Giraudoux bénéficie de l’aide de la Région Centre-Val de Loire (dans le cadre d’un projet Aux Arts Lycéens). Le projet fait l’unanimité alors que l’oeuvre de Thierry Machuel n’est pas simple : «C’est plus de dix ans de travail dont cinq lors de rencontres en prison à Clairvaux. J’ai proposé à des détenus, leurs familles, à des victimes également, de présenter des textes sur leur quotidien pour les présenter ensuite à des chœurs.» Montée en 2016 dans une version beaucoup plus longue, la « Trilogie » a été réécrite et «recentrée cette fois sur les mots des victimes. J’en ai resserré l’écriture pour faire passer le spectacle de 3 heures à 1h45.» Le décor planté, il a fallu préparer les acteurs. À distance comme le raconte Thierry Machuel : «J’ai souvent été seul à travailler pour ce projet. Mais le 15 mai, il y aura 70 personnes sur scène !» Les  premières séances de travail avec les collégiens de Léon XIII – «sélectionnés sur la base du volontariat puis d’une audition» rappelle Régis Gattin, leur professeur de musique – ont commencé en octobre sous la conduite de Catherine Gaiffe, cheffe de chœur au Conservatoire.

La partie récitante pour Jean-Gi

Catherine Gaiffe, chef de chœur du Conservatoire

Dans le même temps, les feuilles de route étaient distribuées aux professeurs de théâtre Anne-Sophie Sanchez et Emmanuelle Ramos du lycée Jean-Giraudoux pour préparer la partie récitante qui incombera à leurs élèves. Idem pour le chœur Lumen Laulu dirigé par Marine Delagarde à Tours ou pour l’ensemble Rose Féart d’Argenton. Un accordéoniste de Lyon, une chanteuse de Ploërmel ont été également associés à l’aventure. Pierre Roullier, lui, sera à la baguette. «Tous les intervenants font un travail exceptionnel. Maintenant, il va falloir faire en sorte que tout le monde fusionne et approfondisse la compréhension du texte» nous expliquait Thierry Machuel en février dernier, lors d’une répétition à la Chapelle des Rédemptoristes.

«Ça va arriver très vite, livrait pour sa part Régis Gattin au coeur de l’hiver. Tout le monde devait se retrouver ensemble sur la scène d’Équinoxe la veille du spectacle.» Régis Gattin croise les doigts pour que la « Trilogie de la détention » trouve son public. Thierry Machuel, lui, envisage déjà l’avenir : «Le spectacle a vocation à tourner. Il faudrait que d’autres collégiens s’en imprègnent. L’idée serait que la trilogie tourne partout où il y a un tribunal ou une maison d’arrêt.»

Trilogie de la détention

Avec ou sans pression


Projet d’ampleur porté par Thierry Machuel (photo), la « Trilogie de la détention » devait faire l’ouverture du 15e Festival de la Voix (14 au 17 mai) dont Régis Gattin, professeur de musique au collège Léon XIII, est également… le président. Une double pression donc, que l’homme rejettait pourtant dans un sourire : «Thierry (Machuel) est le seul à avoir la pression parce que c’est son œuvre. Les gamins savent que c’est l’ouverture du festival, mais monter sur la scène d’Equinoxe est surtout une expérience inédite à laquelle ils adhèrent bien que ce ne soit pas vraiment leur univers musical habituel.»

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