Le CNTS, pôle olympique

L’élite du tir sportif hexagonal a retrouvé son écrin déolois

par Nicolas Tavarès

Au coeur de l’automne, le Centre national de tir sportif a été tiré de sa torpeur par les présélections aux championnats d’Europe. L’écrin du tir français, à Déols, poursuit son évolution avec pour horizon les Jeux Olympiques de Paris 2024.

Le Centre national de tir sportif n’a pas été pensé pour faire des envieux. N’importe quelle fédération sportive rêverait pourtant de disposer d’un pareil outil. Un bout de terrain militaire (plus de 80 hectares du site de la Martinerie, tout de même !), beaucoup de verdure et des stands de tir à foison allant de 10 à 600 m permettant la pratique de douze disciplines – dont les trois olympiques : tir sur cible carabine et pistolet, et plateaux. Le CNTS, comme on l’appelle communément, fait donc la fierté de la Fédération française de tir. Fierté évidemment partagée par Châteauroux Métropole qui a reçu la structure comme un don du ciel. L’année de son ouverture, en 2018, le CNTS accueillait déjà les championnats du monde de Tir sportif de vitesse, l’occasion de mesurer l’importance des lieux à l’intérêt suscité par les nombreuses délégations étrangères.

Le projet, «géré de manière raisonnable» – une mise de départ de 30M € financés à 80 % par la Fédération -, s’est accompagné d’une petite augmentation du coût de la licence qui aurait pu faire grincer les dents des pratiquants s’ils n’avaient pas rapidement compris tout l’intérêt à disposer d’un tel écrin qui manquait dans le paysage. «Nous n’avions pas d’endroit pour entraîner nos Équipes de France. Le moindre stage était couteux, complexe à organiser. Nous disposions, certes, de stands de tir de niveau olympique, mais il fallait souvent disperser notre encadrement, voire envoyer nos équipes à l’étranger pour qu’elles préparent les grandes échéances» contextualise Tony Amengual, chargé de la communication de la Fédération.

Pôle de travail devenu incontournable, le CNTS n’a toutefois pas encore atteint sa vitesse de croisière. Surtout en 2020 où tout le calendrier a été bouleversé par la Covid. Bien que les tireurs soient encore en attente de perspectives claires, le pôle s’est heureusement agité de quelques soubresauts à la fin de l’automne. En plein confinement, le stand 10 mètres a retrouvé le frisson de la compétition pour les présélections aux championnats d’Europe pistolet et carabine prévus fin février à Kisakallio (Finlande). Profitant de l’occasion, les meilleurs juniors hexagonaux ont eux aussi rejoint Déols. Précision d’importance, tout ce petit monde figurait sur les listes des sportifs de haut niveau et était donc autorisé à sortir les armes tout en respectant un protocole sanitaire strict.

Le « stand finales » arrive

Pour les entraîneurs des Équipes de France, la découverte des nouveaux postes en plexiglas, gestes barrières oblige, s’est faite sans heurts. Pas déstabilisée pour un sou, Céline Goberville, vice-championne olympique au pistolet 10 mètres à Londres, a livré son sentiment sur le CNTS : «C’est désormais le plus grand stand que nous ayons en France. Nous n’avons pas encore eu l’occasion de tirer beaucoup ici, mais l’ambiance, la lumière sont parfaites. Il manque juste un « stand finales ». Personnellement, je ne m’y sens jamais trop à l’aise, mais c’est un passage obligé des compétitions internationales. Voilà pourquoi ce serait important qu’il y en ait un au CNTS.»

Franck Dumoulin, champion olympique au pistolet 10 mètres à Sydney était lui aussi présent au CNTS, en qualité d’entraîneur et d’annonceur aux présélections aux « Europe ». Comme Céline Goberville qui filera aux Jeux de Tokyo l’été prochain, Franck Dumoulin (au micro, photo ci-dessus) appelle de ses voeux ce « stand finales », «et une structure d’hébergement qui permettrait d’accueillir encore plus de matchs internationaux ou permettrait de tirer plus longtemps le soir sans se poser de question. Mais le CNTS est en perpétuelle évolution, c’est fait très intelligemment. L’outil est magnifique, bien situé en France. C’est véritablement ce qui manquait. Et puis, ce sont nos murs à nous.» Si la question de l’hébergement est encore dans les cartons, le « stand finales » lui sortira bientôt de terre pour une inauguration prévue en 2022. Mais l’essentiel est ailleurs : la qualité de l’outil CNTS laisse entrevoir des lendemains qui chantent en 2024 avec les Jeux Olympiques à Paris.

Le Berry accueillera-t-il des épreuves ? Rien n’est moins sûr. Tony Amengual : «Nous en avons rêvé, mais c’était très compliqué compte tenu de la distance avec le village olympique et des capacités d’hébergement locales, notamment pour les délégations paralympiques… En revanche, à partir de 2022, le CNTS deviendra la base d’entraînement des Équipes de France. De grandes nations, les États-Unis, la Russie, l’Allemagne, l’Italie, la Chine ou l’Inde s’y intéressent pour organiser leur préparation. Finalement, il vaudra peut-être mieux avoir tous ces entraînements dont certains pourront être accessibles au public !» Un public local à qui le CNTS est prêt à dérouler le tapis rouge.

Pairoux, Paris en tête

Champion de France en titre au pistolet à 10 m, le Buzancéen Gaudéric Pairoux a participé aux championnats d’Europe en février dernier. Le jeune tireur, 24 ans, est dubitatif lorsqu’on lui parle des Jeux Olympiques. Pour Tokyo, il est trop tard. Évoquer ceux de Paris en 2024 lui arrache en revanche un «ahhh !» qui en dit long. «J’ai toujours du mal à me projeter sur des compétitions et les Jeux, c’est loin. Mais on nous prépare à avoir cet objectif-là.» Gaudéric Pairoux aimerait bien retrouver le goût des joutes internationales (une participation à une coupe du monde à Munich). En novembre dernier, au moment des présélections aux « Europe » au CNTS, il reconnaissait être encore loin des canons continentaux. Huit points, en fait, et trois ans pour réussir à les gommer…

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