Astier et Baptist’ battent le pavé

Rock et BD font souvent bon ménage. La preuve avec « Manifestation »

par Nicolas Tavarès

Il y a vingt ans, Laurent Astier composait « Manifestation », morceau confié au groupe Baptist’ qui le porte littéralement en étendard. Histoire d’une rencontre qui sent le rock et le bitume.

Posé dans l’entrebâillement de la porte, Laurent Astier observe, écoute et boit du petit lait. Bon, le lait en question est plutôt houblonné, mais vous aurez saisi l’idée. Les premiers accords de « Manifestation » résonnent et la voix éraillée de Baptiste Pain vient vous prendre aux tripes. Ça fait quelques mois déjà que les Baptist’ ont enregistré le morceau. Maintenant il faut le travailler pour la scène. Enfin quand cette saloperie de Covid permettra au groupe d’y remonter. Alors Laurent Astier déguste : «Baptist’ a donné au morceau l’ampleur sonore qu’il méritait. C’est le son qu’on voulait à l’époque ; en live ça va défourailler ! En plus dans les concerts, tu peux diffuser le clip en arrière-plan». Dans le propos, on devine l’impatience à voir le titre vivre en public, même si « Manifestation » a déjà été présenté une fois en août dernier.

En attendant, le temps d’une répétition, le dessinateur a mis de côté ses crayons et sa « Venin », l’héroïne du western BD qui l’occupe depuis trois ans (lire ci-dessous). «La musique est revenue avec le confinement. J’ai installé mon home studio dans mon grenier. Je joue de la guitare avec mon fils Gabriel, on rigole. C’est ma bulle…» Une bulle que le Castelroussin a décidé de partager l’année dernière. «Ce morceau, « Manifestation », je l’ai composé seul il y a une vingtaine d’années quand je suis arrivé à Châteauroux. On l’a enregistré sur une K7 avec un voisin guitariste et j’ai fait le clip dessiné image par image.» Fin du premier acte. Passage par la case tiroir jusqu’à une discussion avec David Carrère. Le guitariste grattait alors avec les Fernand [Brel Rock Experience]. Laurent Astier remet dans le contexte : «J’avais fait la pochette de l’album des Fernand, j’ai montré « Manifestation » à David.» La suite c’est Baptiste Pain qui la raconte : «David a amené Laurent à nos répétitions. Il nous a parlé de son « truc » un soir. Il ne nous l’a pas proposé tout de suite. C’est David qui a fait le lien.» Il venait de rejoindre l’aventure en compagnie d’Anthony Monicault (basse), autre transfuge des Fernand. Avec Baptiste Pain, Jérémie Boucher (batteur, encore un Fernand !) et Gabriel Paillard (guitare), Baptist’ musclait d’un coup sa base.

CD distribués à l’arrache ?

« »Braille en silence » notre premier EP venait de sortir, on avait besoin de matière tout de suite, précise Baptiste. Gabriel et moi, on s’est vraiment retrouvé autour de « Manifestation ». Ça nous parlait.» Ça ? Un bout d’expérience de la vie plutôt que du revendicatif pur et dur. «J’ai perdu mes premières dents dans la manifestation (…) J’ai bu ma première bière hier à la manifestation» y entend-on. Laurent Astier : «Le titre parle des premières révoltes adolescentes.» De certaines valeurs, aussi, qu’il est bon de transmettre. Astier, toujours : «J’ai emmené mon fils aux manifs de l’hiver 2019. J’avais prévenu son principal au collège pour lui dire qu’il faisait son apprentissage de la vie ! Et si le titre peut être repris de manière populaire, c’est bien» envisage déjà le dessinateur.

«On réfléchit à le sortir dans les prochaines manifestations, complète Baptiste Pain. On est prêt à graver 200 CD pour les donner aux gens comme ça, à l’arrache.» Happening printanier en prévision ; la chose colle parfaitement à l’idée que s’en faisait Laurent Astier : «Leur adaptation de « Manifestation » est vraiment cool. C’est la version de Baptist’ et je ne voulais surtout pas intervenir là-dedans. Bon, ils en auraient fait un morceau de funky, je ne dis pas, mais désormais, il faut que le groupe le joue pour lui.»

Conseil appliqué à la lettre au Petit Souper, leur hangar-studio-salle de répèt’ perdu dans la campagne. «On a besoin de garder le lien, de travailler aussi. On répète un set d’une heure et demi. On est vraiment dans les starts !» clame Baptiste. Dans ses tiroirs, Laurent Astier a d’autres compositions qu’il a déjà proposées au groupe. À l’automne, il avait aussi dévoilé trois pistes typées folk et déposées sur la plateforme Soundcloud sous le nom de The Troubles. Comme quoi, parfois, le confinement ça a aussi du bon.

Dans leur actu


Si les Baptist’ sont pour l’heure sevrés de concerts, ils sont très affairés entre la reprise des répétitions et le remplissage de l’agenda pour les beaux jours. Ils attendent le « Festi’zac » d’Ambazac, en septembre, dont ils ont remporté le tremplin et Baptiste Pain envisage même d’organiser une nouvelle fête de la musique en live streaming au Petit Souper comme il l’avait fait l’an passé avec Ziako, KR Code et Jihel. Laurent Astier, lui, a commencé l’encrage du tome 4 de « La Venin » son western édité chez Rue de Sèvres qui lui a également signé un nouveau projet prévu pour…2024. Il jette un voile mystérieux sur le dossier, mais on devine un horizon dégagé pour le dessinateur castelroussin.

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