Les petites mains ont la parole

Avec leurs machines à coudre, elles ont fabriqué des masques de protection

Les besoins en masques de protection ont fait ressortir les machines à coudre. Rencontre avec des femmes qui se sont improvisées couturières du coeur le temps d’un confinement.

Au final, il n’existera sans doute aucune statistique. Ni même une comptabilité détaillée. On serait pourtant curieux de savoir combien de masques de protection en tissu auront été confectionnés par des particuliers quand la crise du coronavirus sera terminée. Ce que tout le monde aura noté, en revanche, c’est que solidarité et couturières auront fait bon ménage.

Nul n’aurait imaginé qu’autant de machines à coudre puissent ressortir des armoires. Mais à l’exemple de Carole Flamant, il n’y a pas eu à beaucoup réfléchir pour se lancer. «Je suis assistante au Centre français de formation des pompiers d’aéroport. À l’origine j’ai été pendant longtemps agent de méthode dans la confection.» Cette maman de trois grands enfants, engagée dans l’associatif, n’a pas été insensible lorsqu’elle a vu passer les informations évoquant une pénurie de masques de protection. «Le 18 mars, j’ai regardé ce qu’on pouvait trouver, notamment le modèle de masque du CHU de Grenoble (lire ci-dessous), puis on m’a fait suivre un lien parlant des normes AFNOR. Le 19, je terminais mon premier masque pour le prototype.

À son domicile, Carole va donc confectionner ses masques artisanaux qu’elle va offrir dans son entourage, «des personnes âgées, d’autres inquiètes, certaines avec des problèmes de santé…» Sa démarche ne passe pas inaperçue. Carole va rapidement avoir les honneurs des médias de l’Indre. C’est là que tout s’emballe. Des entreprises lui passent en effet commandes. La cadence artisanale s’accélère. «Au plus fort, j’ai reçu 800 demandes de masques en trois jours !»

Valérie Tavarès, opticienne à Châteauroux, est bien loin de ses quantités astronomiques. Son magasin fermé, elle s’est elle aussi lancée dans la confection de masques «pour des amies infirmières libérales qui, à ce moment-là, n’avaient aucune protection pour assurer leurs visites. J’avais également fait des dons de gel hydroalcoolique, de lunettes de protection, de lingettes anti-buées remis aux soeurs Mondon, Marion (podologue) et Anne-Sophie (kiné) qui se chargeaient de les redistribuer. Mais j’ai continué les masques en me basant sur les normes AFNOR. Deux couches en coton, une 100% polyester réalisée avec des vieux maillots de course à pied, de l’élastique que j’avais en stock.» À chacun ses petits secrets de fabrication.

Avec Masques Solidaires 36

Retour auprès de Carole Flamant que l’on retrouve dans une salle communale mise à disposition par la ville de Déols. C’est en partie ici que l’aventure se poursuit désormais pour elle. Lorsqu’elle a entendu parler de Masques Solidaires 36, le relais local d’une opération nationale, mis sur pied par Nicolas Salzard, Ronan Bergot et Valentin Halfon, trois entrepreneurs castelroussins, pour mobiliser les bonnes volontés autour de la fabrication de masques, elle leur a proposé ses services. Aujourd’hui, c’est même elle qui a pris la relève avec Stéphanie Vavassori et Annabelle Arnault.

«Nicolas, Valentin et Ronan devaient s’occuper de leurs entreprises, nous leur avons proposé de prendre la suite» explique Carole. «Nous espérons produire 200 masques par jour et plus si nous pouvons, détaille Stéphanie. Tout est basé sur la solidarité et tous nos masques sont redistribués gratuitement.» Annabelle le concède : «Je ne sais pas coudre, mais j’ai proposé mes services pour assurer la logistique, pour me rendre utile.» Carole Flamant : «Désormais, Masques Solidaires 36, ce sont 5 permanentes dans la salle de Déols et une vingtaine qui travaillent à domicile, mais pas en simultanée. Et surtout, à leur rythme. Nous sommes payées en dons matériels. Nous organisons des tournées, nous fournissons des particuliers, de toute petites entreprises et les associations.»

D’un naturel optimiste, elle a dû tempérer son engagement : «Je ne pense pas à la suite. Quand ce sera terminé, je reprendrai mon travail à l’aéroport.» Parce que oui, il y a une vie après la machine à coudre.

Tuto isérois


Ce n’était qu’un modèle de masque en tissu adressé aux personnels soignants par les responsables du CHU de Grenoble (Isère). «Une option complémentaire pour ceux qui le souhaiteraient» s’empressa d’ajouter le service communication de l’hôpital grenoblois face aux réactions. Sauf que le patron est devenu viral et que les couturières de France et de Navarre s’en sont largement inspirées au début du confinement. Avant que chacune se réfère aux fameuses normes AFNOR devenues la base pour la fabrication de masques réutilisables…

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