Une histoire à écrire

Alexis Rousseau-Jouhennet est le nouveau directeur du château de Valençay

par Nicolas Tavarès

Ce jour-là, les derniers feux de l’été embrasent Valençay. Alexis Rousseau-Jouhennet emprunte l’entrée des visiteurs. D’ici quelques jours pour rejoindre son bureau, le nouveau Directeur du château de Valençay passera par une porte dérobée, en contrebas, rue de la Basse Cour. À quelques jours de sa prise de fonction (le 1er octobre), il navigue entre impatience, «grosse trouille» et enthousiasme. L’ex-Directeur de la communication de Châteauroux Métropole, 38 ans, bascule dans une nouvelle vie. De tous les postes qu’il a occupé, celui-là semble taillé sur mesure.

«Il y a 12 ans, au départ du directeur de l’époque, j’avais déjà postulé. Mais je n’avais que 26 ans.» En avril dernier, apprenant le départ de Sylvie Giroux, il s’est interrogé. «Lorsque j’en ai parlé à Gil Avérous (le maire de Châteauroux, son patron, ndlr), il a eu cette phrase : « Fonce ! Quand le train est en gare, il faut monter dedans car il ne repassera peut-être pas tout de suite. »» La réflexion va mûrir au bout du monde. Sur l’île de Sainte-Hélène où il accompagne les membres du Souvenir Napoléonien pour lancer un nouveau jumelage. Alexis Rousseau-Jouhennet raconte que c’est sur les marches du cottage du général Bertrand qu’il s’est décidé.

La décision à Sainte-Hélène

«J’ai envoyé ma lettre de candidature dès mon retour. Le même jour, Stéphane Bern était à Valençay pour un tournage puis à Levroux pour l’inauguration de la Porte de Champagne.» Le détail n’est pas anodin, il rappelle que depuis 2020, Alexis Rousseau-Jouhennet est le premier édile levrousain. Résumer le parcours du maire « châtelain » relève de l’exploit tant il a à raconter pour chacune des lignes de son CV. S’impose donc le survol d’une vie où l’histoire, la petite, personnelle, et celle avec un grand H ont scellé un destin. Le cadre familial, d’abord. Les Rousseau, dynastie de mégissiers de Levroux, ont un jour croisé les Jouhennet, agriculteurs de La Champenoise. Fier de ses origines bien campées dans la terre indrienne et voyant que le nom maternel (avec ce « e » si rare derrière le « h » de Jouhennet) allait s’éteindre, il modifie son patronyme. «À 18 ans, j’étais heureux de présenter ma carte d’identité à ma grand-mère.»

Maire et préfet de la ville en Lego

Sa singularité s’était déjà manifestée plus jeune. Elle en disait long sur la suite : «Avec ma soeur nous jouions à bâtir des villes en Lego. On se racontait des histoires. Elle était commissaire de la ville, moi j’étais maire et préfet ! sourit-il. J’ai aussi passé des après-midis entiers à tracer des plans de ville sur un carnet. Aujourd’hui, je suis heureux quand je vois un chantier débuter à Levroux. Couper le ruban lors de l’inauguration, j’aime ça, mais quand on en est là, moi je suis déjà sur le prochain projet.» L’autre Histoire, de France, cueille Alexis Rousseau- Jouhennet au lycée. «Le déclic est venu d’une professeure d’histoire qui nous a présenté un film sur le crépuscule de la monarchie. J’ai été passionné par cette période où l’on est passé d’un système très codifié avec un Louis XVI qui tente des réformes et quelque chose de…révolutionnaire. L’été, je devais être le seul lycéen à lire des biographies de Louis XVI sur la plage.»

Les bios de Louis XVI

Celui qui ne s’imagine pas directeur d’un château s’est d’abord rêvé journaliste : «J’ai passé mon stage de 3e à Canal Plus grâce à Michel Denisot. Parce qu’il fallait un DEUG pour faire des études de journalisme, je me suis inscrit en Histoire.» Ses envies de présenter le journal télévisé ne résisteront pas à la passion grandissante. Licence et Master d’Histoire et études des pouvoirs s’accompagneront d’un Master en conseil, politique et communication. Pour son alternance, en 2009, il intègre le cabinet de Jean-François Mayet, maire de Châteauroux. Le DirCab est un certain Gil Avérous. «Ça a tout de suite marché avec Gil qui a ensuite été mon parrain à la Jeune Chambre Économique. J’avais 24 ans. À cet âge on est fougueux et on croit un peu tout savoir mieux que les autres» lâche-t-il, amusé. Gil Avérous lui conseillera d’aller s’endurcir hors de l’Indre. Ce sera au service communication de la ville de Saint-Germain-en-Laye. «J’y ai passé quatre belles années. Je n’ai pas arrêté de les bassiner avec l’Indre. J’ai beaucoup appris là-bas et j’ai tout ramené à Châteauroux !»

Renouveler l’expérience de visite

En 2014, Gil Avérous, devenu maire de Châteauroux, l’embarque en effet dans son navire et en fait son directeur de la communication. «Ça a été un véritable épanouissement. J’ai eu une grande liberté, j’ai créé les réseaux sociaux de la ville. Avec les membres de l’équipe, nous avons renouvelé l’identité des collectivités, refondu le magazine et modernisé le site Internet. J’ai l’espoir de lui avoir donné un ton.» Dans ses attributs de maire, il se défend «de faire de la politique. Je fais de l’action publique. C’est mon engagement citoyen» avant d’admettre, «qu’il y a toujours un fond de politique derrière.» Comment y échapper du reste ?

Même le directeur d’un château dépendant d’un syndicat mixte y sera confronté à l’heure de défendre des dossiers. Au besoin, Alexis Rousseau-Jouhennet pourra toujours s’inspirer des talents de diplomate de l’ancien propriétaire des lieux. Talleyrand n’a-t-il pas débuté sa carrière sous le règne de Louis XVI ? «Il va falloir que je me mette dans la peau de la fonction. C’est un nouveau projet à écrire aux côtés des élus locaux, sous la présidence de Claude Doucet. Je souhaite renouveler l’expérience de visite, ouvrir le château plus longtemps dans l’année, travailler sur l’événementiel privé, s’adresser plus encore au grand public et aux enfants. Le château de Valençay est un très beau terrain d’aventures.» Pour un féru d’Histoire, on ne fera pas mieux.

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