Black Berry, déjà dix ans !

La récente Nuit Polar a mis en exergue la collection de la Bouinotte

par Nicolas Tavarès

Très édulcorée, Covid oblige, la Nuit Polar d’octobre dernier a surtout mis en lumière la collection Black Berry dont les Éditions La Bouinotte fêtent les dix ans cette année.

Entre les murs de la Bouinotte, il y a eu un avant et un après David Verdier. Lorsque celui-ci a présenté « L’homme qui expliquait l’impossible » à Gilles Boizeau, en mai 2010, l’auteur castelroussin n’imaginait pas que son polar porterait une collection sur les fonts baptismaux. Dix ans plus tard, Black Berry a fait florès, compte près d’une trentaine de titres, une escouade d’auteurs qui se délectent à tremper leur plume dans la noirceur des êtres. C’est même à cause de Black Berry qu’une fois l’an, tout Châteauroux mène l’enquête au cours de la Nuit Polar. «À la base, la Nuit Polar a été créée pour valoriser la collection. C’était en 2014, le jeu avait été associé à une séance de dédicaces» conte Gilles Boizeau, éditeur heureux.

Cette année, un virus dont la Nuit Polar avait prémédité l’arrivée en 2019 est venu à bout du rendez-vous qui s’est réduit à la portion congrue : un mini-salon du polar avec quelques belles pointures comme Pierre Pouchairet ou Jérémy Bouquin, et surtout les « enquêteurs » maison, les David Verdier, Pierre Belsoeur, Xavier Viallon et bien d’autres…

En 2010, Verdier proposait donc « L’homme qui expliquait l’impossible ». Dix ans plus tard nous avons à notre tour mené l’enquête pour connaître le secret d’un bon polar. Gilles Boizeau, en bon éditeur qui se respecte, souligne d’emblée qu’à La Bouinotte «on joue sur la qualité des ouvrages plutôt que sur le côté régional de l’intrigue. Certes, 70% de nos titres ont une histoire qui se déroule dans le Berry. L’identité berrichonne est forte dans la maison d’édition, mais pour Black Berry, nous nous attachons malgré tout à avoir les codes du polar national. Alors existe-t-il une recette particulière pour un bon polar ? Disons qu’on posera un ancrage local forcément important, mais surtout ce doit être une bonne histoire. La mécanique doit être bien réglée. Il faut un minimum de temps morts.»

Après la sélection du comité de lecture, qui réceptionne des dizaines de manuscrits chaque année, il y a évidemment les ingrédients propres à l’éditeur : le format poche depuis deux ans pour des questions à la fois de coût et de tarif grand public (entre 11 et 14,50 €). Le tirage d’un « Black Berry » c’est ensuite 6 à 700 exemplaires. Le retirage n’est pas rare, David Verdier, ou Pierre Belsoeur sont bien placés pour le savoir.

L’intrigue policière, ce fil rouge

Justement, Pierre Belsoeur (photo ci-contre) est en train d’écrire son cinquième polar dans la collection. L’ancien journaliste n’a pas suivi un plan de carrière. Il s’est simplement pris au jeu, au sens propre : «Quand on se prend trop au sérieux pour écrire un polar, on s’emmerde et surtout, on emmerde les gens ! Il faut avoir quelque chose à raconter, un lieu, des personnages, quelque chose qui fera bouger l’intrigue policière – le vrai fil rouge -, d’un lieu à l’autre et qui va maintenir l’intérêt du lecteur. Après, le parcours personnel est évidemment important. En tant que journaliste, j’e n’avais écrit qu’un livre politique. C’est la collection Black Berry qui m’a fait écrire des polars.»

Une fois n’est pas coutume, Belsoeur n’a pas fait appel à son vécu pour tracer les grandes lignes de son cinquième polar. S’obligeant même à réorganiser son écriture, sans renoncer toutefois à quelques vieux réflexes comme cette présence récurrente d’un personnage bien particulier : «Un agent immobilier qui s’appelle Victor Dupont, que je fais mourir à chaque fois. Une façon de me venger d’un agent immobilier à qui j’avais eu affaire et avec qui ça ne s’était pas bien passé» sourit l’auteur. Ne pas se prendre au sérieux, toujours.

L’éditeur Gilles Boizeau, lui, est dans un autre rôle, on s’en doute. À charge pour lui de développer sa collection, en la faisant notamment connaître hors des frontières berrichonnes (lire ci-dessous). «Si nous voulons jouer sur une scène plus grande, à un moment, il faudra repenser notre façon de faire avec une programmation à six mois. Actuellement, nous sommes sur des délais beaucoup plus courts.» En dix ans, petite Black Berry a bien grandi, mais sa croissance n’est pas encore terminée.

Cognac, plus qu’un digeo


Si le salon « Quai du Polar », à Lyon, est LE grand rendez-vous du roman noir en France, « Polar le festival de Cognac » suit de peu dans la hiérarchie. C’était du 16 au 18 octobre derniers et la collection Black Berry y était indirectement représentée. Jérémy Bouquin, auteur de « Mémoire Cash » qui vient de sortir chez Blackberry, figurait en effet au rang des auteurs en lice pour recevoir un prix avec « Chien de Guerre » (aux éditions du Caïman). Gilles Boizeau, présent lui aussi en Charente, ne boudait pas son plaisir : «C’est le moyen de se faire connaître du monde du polar. On se confronte à d’autres éditeurs, on valorise nos auteurs. Être à Cognac, c’est gagner en influence et surtout trouver de nouvelles solutions pour faire voyager notre collection au-delà du Berry.»

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