Marchais, une histoire de goût

Le chef castelroussin s’autorise toutes les folies culinaires

par Nicolas Tavarès

À bientôt 45 ans, Christophe Marchais a fait de son restaurant « Jeux2Goûts » l’une des tables réputées de Châteauroux. Itinéraire d’un chef gâté.

C’est l’histoire d’un mec né au Blanc et qui, 45 ans plus tard, mène sa barque quelques kilomètres plus loin, rue Grande à Châteauroux. Mais entre les premiers cris du bébé Marchais, un jour de décembre 1975, et les petits plats que mitonne Christophe dans son restaurant « Jeux2Goûts« , il y a un long itinéraire culinaire qui a forgé une réputation. L’heure du bilan est encore loin. Elle viendra le plus tard possible. Pourtant, lorsqu’il se retourne sur son parcours, Christophe Marchais confesse un grand regret : «Celui de ne pas avoir tenu dans un gros gastro. J’ai fait des essais, mais peut-être que je ne suis pas tombé dans les bons établissements. Un gastro, tu y apprends des choses que tu n’apprends pas ailleurs. Et beaucoup plus rapidement.» Ce n’est pas qu’il souhaitait brûler les étapes, mais cette porte-là était fermée. Alors il a pris son temps, c’est plus fastidieux forcément, mais jalonné de tellement de rencontres marquantes ou décisives.

Flash back sur les jeunes années de l’aspirant Marchais. CAP, BEP, Bac Pro cuisine, puis l’armée abritée au mess des officiers de la caserne de Thionville. Tout juste libéré de ses obligations militaires comme on disait alors, Christophe passe deux ans à Saint-Jean-de-Braye. Mais son avenir est ailleurs : «Je suis allé à Paris avec mon CV sans savoir où je tombais. Je suis passé par une agence spécialisée et je me suis retrouvé à « La Marée », un étoilé, comme chef de partie. Je n’avais pas le niveau, je n’ai tenu que deux semaines. J’avais 21 ans, ça m’a remis en place direct !»

La claque laisse une trace, mais sous un air débonnaire qu’il affiche encore aujourd’hui, Christophe Marchais ne renonce pas pour autant et «bouge» énormément dans la capitale : Le « Bistrot de Paris », un temps propriété de Michel Oliver, le « Tout Paris », au dernier étage de la Samaritaine, la maison Philippe Faure-Brac, meilleur sommelier du monde en 1992, « Tante Jeanne », l’un des restaurants de Bernard Loiseau, « L’Estaminet de Gaya », « Miss Betsy »… Et au milieu, le « Shozan », un restaurant franco-japonais à la carte world food. «Un véritable déclic. Il y avait deux chefs dont un vrai sushi chef et un Allemand, Frithjof Wimmer. Il m’a donné envie, il était calme, ouvert. Allemand dans un restaurant japonais, fallait l’être ouvert de toute manière. Tout a démarré là.»

L’Allemand dans le resto japonais

Au bout de deux ans, Frithjof partira, Christophe l’imitera. Le temps a passé et l’opportunité de rentrer au pays en compagnie de Cécile Cacciatori se présente: «Créer un restaurant à Azay-le-Ferron dans un ancien relais de poste.» « Terre de Brenne » ouvre, l’aventure est une réussite. Mais au bout de trois ans, l’envie de nouveauté taraude le couple.

«On a visité quelques établissements à Châteauroux. Le patron de l’un d’entre eux était venu manger à Azay-le-Ferron. C’était le propriétaire de « Chez Bob », Philippe Labrosse. Il souhaitait revendre son affaire. On s’est revu et la chose s’est faite rapidement.» C’était il y a douze ans, un 10 février. La rue Grande découvrait un nouveau restaurant appelé « Jeux2Goûts« . Christophe et Cécile ouvraient quant à eux la parenthèse professionnelle la plus importante de leur vie. Christophe au piano, Cécile en sommelière émérite. «La première année fut difficile, mais ensuite, ça n’a fait qu’augmenter.» La «faute» à cette cuisine débarrassée d’artifices à l’image du chef. «Une cuisine qui vit, tout simplement, dans laquelle je ne peux évidemment pas enlever les produits de la mer.» Le chef ne s’interdit rien, tente beaucoup et surfe sur la vague des réseaux sociaux pour asseoir le sérieux de sa table. «Les réseaux, c’est juste de la com’, sourit-il. Une fois, nous avions fait un menu boeuf japonais, du wagyu, à 120 € sans les vins. Il y avait une part de risque. L’annonce postée sur Facebook nous a rempli le restaurant pendant 15 jours !»

Forcément la notoriété de « Jeux2Goûts » a résonné au-delà des frontières de l’Indre. Un « Bib Gourmand » Michelin est tombé sans que Christophe ne court après. «Si demain Michelin m’appelle pour une étoile, je ne cracherai pas dessus. Mais c’est une pression avec laquelle il faut vivre. Pour l’instant, je préfère voir le restaurant plein. Et en l’état actuel, on ne peut y prétendre.»

Ses priorités du moment, c’est plutôt la mise en place d’un drive (jeudi, vendredi soir et samedi midi). Ainsi en ont décidé les circonstances, mais les palais avertis ne s’en plaindront pas.

Un tatoué, un vrai !

Le dessin, les tatouages et Christophe Marchais, c’est une longue histoire d’amour. Du premier, il puise parfois des idées pour le dressage de ses tables. Pour les seconds, ce sont des artistes qui les ont posés sur sa peau. Son corps est devenu une pièce de musée tant les tatouages y prennent de la place. «J’en ai 17 en tout, sans qu’ils aient forcément une signification particulière, explique-t-il. La seule chose, c’est qu’ils se rejoignent tous ! Les tatouages, en fait, j’en ai toujours voulu.» Ben Wasabi, Luis (Balivernes Tattoo), Denis et Lucette (Atelier D) ou Disea ont laissé leurs oeuvres sur le dos, les jambes ou les bras du restaurateur. L’inspiration asiatique est forte, mais Christophe reste évasif quant à l’origine d’un petit canard caché…

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